Depuis le déferlement de l’armée russe sur l’Ukraine le 24 février dernier, le refus par le Kremlin d’employer certains mots – en privilégiant notamment le terme « opération militaire spéciale » à « guerre » ou « invasion » – nous oblige à revenir sur la juste qualification, en droit pénal international, des actes commis dans le cadre de ce conflit, en vue de désinstrumentaliser cette rhétorique politicienne et ainsi redonner aux violences commises leurs réels contours juridiques.
Le Statut de Rome prévoit la juridiction criminelle au niveau international à l’égard des individus qui commettent un des crimes qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. Il réprime les violations du droit international humanitaire et définit les crimes internationaux fondamentaux les plus graves : le crime d’agression, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le crime de génocide.
La professeure Muriel Paradelle décortique les éléments à prendre en compte pour retenir la qualification pénale de crime contre l’humanité au sens du droit international dans le contexte du conflit en Ukraine. On entend par crime contre l’humanité un acte commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque, que ce soit dans un contexte de guerre ou non. Ces actes comprennent notamment les meurtres, la torture, les violences sexuelles, l’esclavage, la persécution et les disparitions forcées. Ainsi, les actions de l’armée russe en Ukraine peuvent-elles être qualifiées de crimes contre l’humanité au sens de l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale?